Quelques considérations sur le génocide arménien de 1915-1916
Une élimination planifiée et intentionnelle par le pouvoir ottoman
Dans
le rapport du Comité de l'œuvre
de secours 1915 aux Arméniens, on peut lire : « un plan général
et uniforme,
provenant d'une seule volonté centrale a été suivi ». On
comprend, à travers ces lignes, qu'un «
plan » a été élaboré donc que l'élimination a été planifiée.
Ce plan a été mis en place par une « volonté centrale »,
expression qui désigne le pouvoir central implanté à
Istanbul/Constantinople, capitale de l'Empire
ottoman à l'époque. C'est le mouvement politique Jeune-Turc, au
pouvoir depuis 1908, qui est à
l'origine
de cette planification de l'élimination des Arméniens de l'Empire
ottoman à partir d'avril 1915.
Une élimination qui a concerné une grande partie des Arméniens
Le
rapport précise que les faits se sont produits dans « toute la
Turquie d'Asie du nord au sud, d'orient en occident.
Pas un village, pas un hameau, pas une ville n'ont été épargnés
». Cette information - un peu exagérée - est nuancée par la
vision qu'offre la carte sur la localisation des massacres : ils ont
surtout eu lieu
dans les grandes villes du centre et de l'est de la Turquie, là où
se concentre la communauté arménienne
(en jaune sur la carte). Personne ne semble échapper à cette
élimination puisque le rapport précise
la liste des victimes : « toute la population masculine que l'on
massacre ou que l'on entasse dans des
prisons » ; « ordre à toute la population féminine, aux
vieillards et aux enfants de quitter la ville, mise en
marche d'interminables convois que l'on affame ».
La
carte vue en cours précise le sort des Arméniens. Ils ont été victimes de «
massacres » dans les villes mais aussi de « marches de la mort »
où ils été déplacés de force, contraints de marcher longtemps et
sur de longues distances.
Beaucoup sont morts d'épuisement ou éliminés par les soldats qui
encadraient ces marches. Le rapport
complète ce que la carte montre. On apprend que les Arméniens ont
été recrutés de force dans l'armée et envoyés se battre sans
qu'ils ne soient armés. D'autres sont assassinés, torturés, des
femmes sont
violées. Au total, entre 1 et 1,2 millions de personnes sont mortes.
Une élimination justifiée par des motifs religieux et ethniques
Dans
le rapport, on apprend les raisons ayant motivé ces actes envers la
communauté arménienne de l'Empire
ottoman : « on promet à ceux qui se feront musulmans qu'ils seront
exemptés de la
déportation
». Les Arméniens sont chrétiens ; leur élimination s'explique
donc par des motifs religieux.
D'autre
part, le régime Jeune-Turc cherche à rendre la population ottomane
homogène (une population entièrement
et uniquement turque, d'où l'élimination des Arméniens mais aussi
de la minorité kurde dont
il
est aussi question dans le rapport). Cette élimination s'explique
donc aussi par des motifs ethniques.
Dans
le contexte de l'année 1915, où l'Empire ottoman connaît des
difficultés militaires importantes, les Arméniens
sont perçus comme des traitres à la patrie, ne se battant pas ou
peu pour défendre l'Empire ottoman.
Le pouvoir central les perçoit comme responsables de ces difficultés
militaires.
Entre
avril 1915 et juillet 1916, la communauté arménienne de l'Empire
ottoman a donc bien été victime d'un
génocide. On peut l'affirmer car les violences dont ils ont été
victimes correspondent aux trois critères
de définition d'un génocide :
-
l'élimination de cette communauté était intentionnelle et
planifiée par le pouvoir ottoman
-
l'élimination concerne une grande partie de la communauté
arménienne de l'Empire ottoman
-
l'élimination de la communauté arménienne a été justifiée par
des motifs religieux et ethniques