Introduction
• Le bassin méditerranéen désigne à la fois la mer Méditerranée (une mer quasi intérieure simplement ouverte sur l'océan Atlantique par le détroit de Gibraltar) ainsi que les 21 Etats installés sur ses littoraux. Or cette définition pose le problème des limites exactes du bassin méditerranéen car tout le territoire des Etats riverains de la Méditerranée ne peut pas être inclus dans la zone méditerranéenne (il serait absurde de classer la Bretagne dans le bassin méditerranéen même si la France est installée au bord de la Méditerranée). Ainsi, le seul critère simple à retenir pour délimiter le bassin méditerranéen est le climat méditerranéen : il pose un décor homogène pour tout cet ensemble (le géographe Jacques Bethemont retient les limites de la zone de culture de l'olivier pour définir le bassin méditerranéen).
• Ce bassin est une des interfaces Nord-Sud de l'espace mondial (c'est-à-dire une zone de contact entre deux espace de nature différente : espace maritime et espace terrestre ; espace développé et espace en développement). Bien que la Méditerranée soit traditionnellement retenue comme frontière entre l'Europe, l'Afrique et l'Asie, elle semble plus rapprocher ces trois continents qu'elle ne les sépare, ne serait-ce que par l'intensité des flux qui transitent par cette mer. Malgré les tensions voire les conflits qui ont émaillé l'histoire de la Méditerranée, les échanges - notamment commerciaux - sont anciens et intenses en Méditerranée.
• Problématique : Comment cette position d'interface se traduit-elle dans les paysages et
l'organisation de l'espace du bassin méditerranéen (à toutes les échelles) ?
I. Le bassin méditerranéen, une zone de fractures
A. Des fractures historiques et culturelles manuel, p.303
• Aujourd'hui, on distingue autour de la Méditerranée trois grands ensembles culturels :
- au Nord-Ouest (en Europe occidentale), un ensemble catholique qui est
l'actuelle survivance de l'Empire romain. Le christianisme devient en effet
religion officielle de l'Empire romain en 380 ;
- au Nord-Est (en Europe de l'Est et dans les Balkans), un ensemble orthodoxe
qui est l'actuelle survivance de l'Empire byzantin. Le christianisme
orthodoxe est la religion des Byzantins à partir de 1054 ;
- au Sud et à l'Est (au Proche-Orient, au Machrek et au Maghreb), un
ensemble musulman qui est la survivance des califats musulmans du Moyen- Age dont l'Islam est la religion à partir de 622.
• La présence des ces trois ensembles culturels est encore perceptible aujourd'hui. Elle se manifeste par la présence des trois ensembles linguistiques (qui correspondent en gros aux ensembles religieux) : langues grecques sur l'ensemble orthodoxe, langues latines sur l'ensemble chrétien et langues arabes sur l'ensemble musulman. Ces divisions culturelles passées ressurgissent aussi dans des tensions et des conflits actuels en Méditerranée. Le bassin méditerranéen n'est pas stable géopolitiquement (on en veut pour preuve la présence de l'armée américaine) : des Etats ont été marqués par des guerres civiles (comme l'Algérie dans les années 1990), des Etats sont encore en guerre (comme entre Israël et l'autorité Palestinienne depuis les années 1950), des Etats ont récemment été frappés par des actes de terrorisme (comme en Espagne en 2003). Enfin, le partage de l'eau - qui manque cruellement au Proche-Orient - est source de tensions.
B. Des fractures de richesse et de développement , p.302, n°1• Les Etats les plus riches et développés se situent au Nord de la Méditerranée, ce sont
les Etats membres de l'Union européenne (du Portugal à Chypre, hormis les Etats de la péninsule balkanique), l'un des trois pôles de la Triade. Leur IDH est supérieur à 0,9 et leur PIB par habitant dépasse les 20 000 dollars annuels. Ils font partie des Etats les plus riches et développés à l'échelle mondiale.
• Les Etats les moins riches et développés se situent à l'Est et au Sud de la Méditerranée (depuis la Turquie jusqu'au Maroc). Leur IDH est compris entre 0,7 et 0,9 et leur PIB par habitant entre 5 000 et 20 000 dollars annuels (on constate donc des écarts importants). Ce sont des Etats du Sud dans une situation intermédiaire : ils se sont pas encore des pays émergents mais ne sont pas au stade des PMA d'Afrique subsaharienne (leur économie repose sur l'exportation de matières premières ou l'accueil de touristes, ce qui leur permet d'être aisément insérés dans les échanges mondiaux).
• Deux zones font exception à cette logique Nord-Sud : les Etats de la péninsule balkanique, du côté européen, ont un IDH et un PIB/habitant proches de ceux des pays du Sud et de l'Est de la Méditerranée (PSEM) alors qu'Israël, qui est implanté au Proche-Orient est un Etat riche et développé (avec des performances comparables aux Etats membres de l'Union européenne).
C. Des fractures de peuplement et démographiques, p.302, n°2
• Dans le bassin méditerranéen, les densités sont inégales donc la population est
inégalement répartie. Mais globalement, les fortes densités sont concentrées à proximité des littoraux (d'où la raison pour laquelle on parle de littoralisation de la population). Cela dit, les zones de forte densité sont plus étendues sur la rive Nord que sur la rive Sud (où les fortes densités sont vraiment coincées sur le littoral).
• La rive Nord enregistre une croissance démographique faible voire nulle (elle est inférieure à 5‰ par an) alors qu'elle est soutenue sur la rive Sud (nettement supérieure à 5‰ par an). Ceci s'explique par le fait que la croissance démographique est achevée au Nord (la natalité et la mortalité sont basses et au même niveau) et pas au Sud (où la natalité est encore largement supérieure à la mortalité qui a nettement baissé).
• On observe un basculement démographique entre les deux rives de la Méditerranée : la population de la rive Nord stage alors que celle de la rive Sud explose donc le fossé démographique historique entre rive Nord et rive Sud disparaît (les pays du Nord de la Méditerranée compte 210 millions d'habitants contre 260 pour ceux du Sud). D'autre part, la population s'entasse dans les espaces urbains littoraux totalement saturés : on parle de marbellisation du littoral (en référence à la station balnéaire espagnole de Marbella où le front de mer a été totalement bétonné, afin de loger les touristes). Là, les densités atteignent souvent plus de 10 000 habitants au km², soit autant que dans le centre des grandes « villes monde ».
A. LES FLUX HUMAINS : Les MIGRATIONS DE PERSONNES.
1°) L’explosion des flux migratoires.
® Le phénomène est délicat à quantifier du fait de l’incertitude des statistiques : elles sont difficiles à trouver, toujours faussées par les migrations clandestines, inadaptées le plus souvent (les chiffres dont on dispose sont les chiffres du nombre de personnes déclarées dans chaque pays, il s’agit du résultat de migrations anciennes, pas des migrations actuelles)
a) Pays de départ, d’accueil, de transit
® Les déséquilibres économiques entraînent d'importants flux migratoires selon un axe Sud / Nord et un axe Sud-est / Nord-ouest.
® Attention : des pays comme l’Espagne, l’Italie, la Grèce, qui furent autrefois des terres d’émigration sont devenus récemment des terres d’immigration !
1. Les pays de départ sont au Sud et à l’Est
§ Dans le cas des flux S/N : certains pays du sud - Maghreb, Turquie et Liban - sont à la fois des pays de départ et des pays de transit pour des migrants d’une origine plus lointaine (Afrique subsaharienne ou Asie méridionale ou orientale)
§ Il existe aussi des flux S/S : d’Egypte des migrants partent vers la Libye ou le Moyen-Orient ; la Libye a accueilli des migrants puis les a renvoyés (elle est aussi un pays de transit)
§ Des difficultés parfois pour le sud
ú Les foyers traditionnels d’émigration (Grande Kabylie par exemple) peuvent se trouver affectés par le départ de leurs forces vives entraînant vieillissement de la population et déprise rurale.
ú Des pays de transit peuvent se trouver confrontés à la difficile gestion de migrants clandestins (cf. Maroc avec la migration transsaharienne des noirs qui affluent vers les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla pour tenter de gagner l’Europe)
2. Les pays d’accueil sont essentiellement au Nord
§ Dans le cas des flux S/N : certains pays du nord – Italie, Espagne, France - sont à la fois des pays d’accueil et des pays de transit pour des migrants qui se rendent plus au nord en Europe, vers le R.U., l’Allemagne ou les pays scandinaves .
§ Il existe aussi des flux N/N : nombre de pays balkaniques sont des pays de départ (mais sont-ils au nord ou au sud ?...)
§ L’immigration pose dans les pays d’accueil des problèmes parfois difficiles : problèmes d’intégration aux plans économique, social et culturel.
3. Les formes de migrations à l’échelle méditerranéenne
§ Des migrations strictement méditerranéennes : Exemple type : Maroc-Espagne ; Maroc-France ; Libye-Italie.
§ Des migrations dissymétriques. :
ú Pays méditerranéen au sud, vers un pays d'Europe du Nord,
ú Pays subsaharien vers pays européen méditerranéen du Nord (en essor).
§ Des migrations de strict transit
ú Pays subsaharien vers pays d'Europe du Nord (minoritaires)
b) Des flux préférentiels
1. Les mouvements N/S se font en priorité vers les pays qui ont des liens avec le pays de départ,
ð Causes :
§ L’importance des structures communautaires
ú Liens familiaux établis dans ces pays par les migrants
ú Réseaux villageois ou ethniques
ú Filières
§ Les raisons linguistiques, donc le plus souvent historiques (colonialisme)
ð Exemples :
ú Maghreb à France
ú Libye à Italie
ú Turquie à Allemagne
ú Égypte à Royaume-Uni.
ð Remarque :
® Cette concentration géographique se retrouve à l'échelle locale : concentration des populations de certaines zones des pays dans certaines régions du pays d'accueil, voire dans certains quartiers.
2. Limite du phénomène : une tendance récente à la dispersion
ð Les terres d'accueil se sont élargies à de nouveaux territoires, en particulier pour les maghrébins :
§ Les pays scandinaves
§ Le Royaume-Uni (accueil des opposants islamistes et législations migratoire plus souple)
§ La péninsule ibérique.
ð Aujourd'hui : création de diasporas comme la diaspora marocaine (1,6 Millions de marocains vivent dans 15 pays différents)
c) Les migrations clandestines
1. Flux et pôles
ð Les flux de clandestins viennent souvent de pays situés en dehors du monde méditerranéen, à l’exception de l'Albanie.
ð Trois plaques tournantes de l'immigration clandestine :
§ Turquie
§ Italie du Sud
§ Maroc/Espagne
2. Un essor considérable
ð Causes :
§ Les législations européennes deviennent de plus en plus restrictives pour compenser l'élargissement de l'espace de Schengen, avec des mesures draconiennes pour lutter contre l'immigration clandestine en particulier de la part des 5 pays les plus concernés qui ont harmonisé leur législation dans ce domaine.
§ L’organisation de réseaux et de filières clandestines d’immigration participe à la diversification des activités mafieuses mondialisées
§ La situation intérieure de certains pays de départ est de plus en plus catastrophique (Afrique subsaharienne, Kurdistan…)
ð Les seules statistiques fiables sont celles des reconductions à la frontière.
§ Elles sont en augmentation constante : 94000 en Espagne, 46000 au Royaume-Uni, 9000 en France, 4500 en Allemagne, 2500 en Italie.
® Cette immigration clandestine coûte cher, sur le plan économique et surtout en vies humaines.
Conclusion partielle
® Les pays du Nord ont compris que le problème de l'immigration ne pouvait être abordé que sur la façade nord mais devait être approché globalement.
® Ils portent un intérêt croissant aux états qui sont en première ligne maintenant dans le processus migratoire (pays du Maghreb, Libye, Turquie) et passent des accords avec eux pour qu’ils renforcent leurs contrôles aux frontières.
® La solution à long terme passe par le développement des pays du sud.
2°) L’essor des flux touristiques.
® Ils sont un autre aspect des contacts nord-sud. Là aussi la Méditerranée constitue un espace de contact, une zone intermédiaire.
a) La Méditerranée est le premier bassin touristique de la planète
® 150 à 200 Millions de touristes, soit 30 à 40 % de l'accueil et 1/3 des recettes mondiales.
1. L’attraction du sud sur les touristes : que va-t-on chercher dans le sud ?
§ Mer + soleil + sécheresse estivale = tourisme balnéaire estival, mais aussi hivernal (c'est même le tourisme hivernal qui fut à l’origine du phénomène, la Côte d’Azur étant de ce point de vue un excellent exemple)
§ Berceau de civilisations : tourisme patrimonial vers les monuments.
§ Interface civilisationnel => tourisme urbain et culturel.
§ Mer : tourisme de croisière.
§ Paysages et modes de vie différents
§ Tourisme sportif sur les sites aménagés (cf. plongée sous-marine en Mer Rouge)
2. Un phénomène valable pour la rive nord comme pour la rive sud de la Méditerranée
§ Les régions méditerranéennes françaises, italiennes, espagnoles ont pleinement bénéficié de cet effet sud.
§ L’espace touristique s’est ensuite élargi aux îles, à la Tunisie, au Maroc, et plus récemment à la Turquie et à certaines côtes israéliennes (avant la seconde Intifada).
b) Les lieux du tourisme : la localisation des foyers d'accueil
® Le tourisme n'est pas un élément totalement lié à la situation d'interface car seule une partie du tourisme balnéaire est un tourisme d'interface, certains touristes du Nord allant chercher au Sud des tarifs plus compétitifs.
1. Le tourisme concerne essentiellement le Nord.
1.1. Le Poids prépondérant du Nord
§ Principal émetteur de flux touristiques :
ú L’Europe est un véritable réservoir de touristes à hauts revenus
ú Pour le tourisme, l’aire méditerranéenne est davantage sous influence européenne. (En 10 ans en Egypte les pays européens sont passés de 30 à 56% de la fréquentation touristique de ce pays, avec parallèlement une baisse de la fréquentation américaine amorcée lors de la première guerre du Golfe.)
§ Principal récepteur des flux touristiques aussi : 33% des touristes vont en France (mais pas tous sur les rives méditerranéennes), les 2/3 vont sur l'Arc Latin et la Grèce.
ú Il y a en fait davantage de flux N/N que de flux N/S vers la Méditerranée
ú Les principaux foyers récepteurs sont l’Italie, l’Espagne, PACA, Languedoc-Roussillon, la Grèce
1.2. Les raisons de la suprématie de la rive nord
§ La plus grande proximité des foyers émetteurs.
§ La facilité d'accès liée à la présence de réseaux autoroutiers et d'aéroports importants.
§ Une tradition et des aménagements touristiques plus anciens : volonté des états de développer ce secteur d’activité
§ La stabilité politique.
§ Le meilleur équipement en quantité et en qualité.
1.3. Les variations récentes
§ La Croatie à la hausse : la côte dalmate est en train de faire des efforts considérables pour ré attirer les touristes qui avaient déserté durant la guerre en ex-Yougoslavie. C’est surtout le domaine des européens de l'Est, aux moins grands revenus, mais la côte dalmate est une destination de plus en plus prisée pour les ressortissants de l’UE aussi.
§ Israël à la baisse, qui subit les contrecoups de l'instabilité politique.
2. Dans les PSEM
2.1. Au Sud le tourisme est une activité moins développée qu’au Nord
§ Si l’on s’en tient aux ressources balnéaires, à la composante climatique de l’effet sud et à l’exotisme, la rive sud devrait être plus développée que la rive nord en matière de tourisme, ce qui n’est pas le cas, car plus on s’éloigne de l’Europe du nord-ouest, plus les flux sont faibles. En Tunisie et au Maroc, il y a des lieux touristiques isolés près des aéroports.
§ D’autres facteurs sont donc fondamentaux qui font défaut au sud, partiellement ou totalement : l’accessibilité, les modes de transports utilisables en continuité, les équipements, donc les capitaux, la stabilité géopolitique, les facteurs culturels (religion, pudeur)
2.2. Les principales destinations
§ Concentration des stations balnéaires sur le littoral avec deux destinations majeures pour le tourisme international :
ú La Tunisie
ú La Turquie.
§ Mais il existe aussi un tourisme national non négligeable et en plein essor au Maroc, en Libye, au Liban, en Syrie.
§ Dans ces états, le tourisme est une importante source de revenus. Il permet aussi des contacts entre les populations du nord et du sud. Ces contacts donnent une image du Nord qui participe à l'alimentation des flux migratoires.
Conclusion partielle :
® La mobilité des hommes, touristes ou migrants est source d’enrichissement mais aussi de tensions.
® Ses effets sur les sociétés et les territoires sont nombreux et complexes mais ils dépassent assez largement le cadre de notre étude dans la mesure où toutes les zones extra méditerranéennes sont concernées, notamment en Europe.
B. LES FLUX ECONOMIQUES, COMMERCIAUX ET FINANCIERS.
1°) Les flux de marchandises.
a) Un espace traditionnellement ouvert aux échanges
ð La Méditerranée a toujours été caractérisée par des flux commerciaux importants du fait de ses ouvertures :
§ Ouverture vers l'Asie centrale et la Chine (route de la soie) par Istanbul et le Moyen-Orient
§ Ouverture vers le Monde indien et la Chine par Suez
§ Ouverture vers l'Afrique noire par la vallée du Nil, la Libye.
§ Ouverture vers l'Afrique occidentale, les Amériques et l'Atlantique nord via Gibraltar
§ Ouverture vers les Flandres et les plaines d'Europe du Nord via la vallée du Rhône.
ð De ce point de vue la Méditerranée a toujours été une interface entre Orient et Occident (bien davantage qu’entre Nord et Sud)
b) Des échanges dissymétriques qui répondent aux besoins de l’économie européenne.
ð Les échanges sont le reflet des niveaux de développement
ð Dans le sens nord / sud : exportation de produits fabriqués, de machines, de blé, de produits laitiers
ð Dans le sens sud / nord :
§ Le tonnage est plus important,
§ Exportation de produits bruts et semi affinés,
ú Hydrocarbures surtout mais aussi minerais, phosphates, d’où la création de pôles industriels littoraux comme Skikda et Arzew en Algérie
ú Produits agricoles du sud : oranges, tomates, légumes etc..
§ Depuis une dizaine d’années s’y ajoutent des produits fabriqués à bas prix dans les ports (Tunisie, Maroc, Turquie) dans le cadre de délocalisations ou de spécialisations dans le cadre de la mondialisation (textile et habillement par exemple).
ú Ces pays sont en quelque sorte devenus des pays ateliers pour l’UE.
ú Ils souffrent actuellement de l’augmentation des exportations chinoises en matière textile
ð Les échanges des pays du Sud se font essentiellement avec l'Union Européenne ; ainsi les pays du Maghreb assurent 60% de leurs échanges avec l'UE.
c) Des échanges essentiellement maritimes.
1. Une fonction de transit pour l’essentiel.
§ Là aussi il s’agit la plupart du temps de transit à destination de l’Europe du Nord-ouest.
§ Les flux de strict transit représentent 80 % des marchandises transportées, avec une forte concentration en tonnage sur la France, l’Italie, l’Espagne.
2. Quatre secteurs portuaires majeurs tous situés au Nord.
§ Marseille-Fos assure 30 % des flux du Nord.
ú C'est un renouveau récent, mais Marseille est le 1er port français aujourd'hui. Par contre, une grande partie du trafic est du transit vers l'Europe du Nord.
ú Aujourd'hui Marseille est un hub : Aéroport (2ème français pour le fret, 3ème pour les passagers) + TGV (3 heures de Paris) + Port.
ú En revanche le port a pris un lourd retard en matière de conteneurs du fait des pressions exercées par les syndicats de dockers qui y sont hostiles : ce trafic d’avenir est donc largement capté par d’autres ports maritimes
§ Gênes-Livourne : 25%
§ Venise-Trieste : 25%
§ Barcelone-Tarragone-Valence : 20%
3. Les autres sites portuaires ont un rôle mineur
§ Essor des ports porte-conteneurs d'Algerisas (Espagne) et Giaua-Tauro (Italie) qui redistribuent les conteneurs dans toute l'Europe du Nord.
§ Le sud est nettement moins bien équipé ce qui traduit bien l'inégalité des façades.
2°) Les flux de capitaux
a) Les échanges de capitaux : des flux du Nord vers le Sud.
ð Ils consistent surtout en paiements et en investissements de délocalisation.
§ Délocalisations ou implantations de sociétés industrielles (composants électroniques par exemple)
§ Délocalisation de services : centres d'appels, sociétés d'assurances au Maroc ou en Tunisie (les populations sont jeunes, bien éduquées, parlent français sans accent avec un peu de formation, les exonérations fiscales durent 5 ans, le coût de la main d'oeuvre est peu élevé, l'Europe est très proche)
ð Autre poste important : les envois d’argent des travailleurs migrants originaires du Sud dans leur famille restée sur place.
ð A la marge : les retraités du Nord qui vont s’installer au Sud pour leur retraite, au Maroc notamment
b) Leurs effets à grande échelle
ð Le développement de zones de cultures irriguées d’exportation vers le marché européen. (cf. plaine de Sousse et de Sfax en Tunisie, littoral atlantique au Maroc)
La littoralisation des activités et les échanges de produits.III. Le bassin méditerranéen, une zone de coopération, p.313
A. Vers un rééquilibrage des relations Nord-Sud
• La conférence de Barcelone, qui a réuni en 1995 tous les chefs d'Etats et de
gouvernement méditerranéens, a mis en place un programme de coopération à l'échelle d'un grand bassin méditerranéen (27 Etats) nommé MEDA (Méditerranée Aides). Ce
programme se décline en trois volets majeurs :
- au plan politique, il s'agit de créer une « zone de paix et de stabilité ».
Autrement dit, les Etats signataires s'engagent à favoriser le dialogue entre eux afin de réduire certaines tensions diplomatiques (entre l'Algérie et le Maroc à propos du tracé de leur frontière dans le Sahara) ou de mettre fin à
des conflits toujours en cours (celui entre Israël et l'autorité Palestinienne) ;
- au plan culturel, il s'agit de favoriser la compréhension et les échanges entre
les ensembles culturels installés sur les rives de la Méditerranée (dans la
perspective de réduire les tensions et de limiter les conflits) ;
- au plan économique, il s'agissait de mettre en place une zone de libre échange à
l'horizon 2010. Concrètement, il s'agissait d'abaisser (voire d'annuler) les taxes
douanières sur les échanges commerciaux (de biens et de services) ;
• En 2008, la conférence de Barcelone a été complétée et prolongée par l'Union pour la Méditerranée. L'UPM est un accord regroupant 44 Etats (tous les membres de l'UE ainsi que les PSEM). Elle complète la conférence de Barcelone sur les questions environnementales (réduction des pollutions en Méditerranée, meilleur partage des eaux) et tente de lutter contre l'immigration clandestine en direction de l'UE.
B. Vers une gestion durable du bassin méditerranéen
• Trois menaces environnementales majeures menacent le bassin méditerranéen. Une
grande partie des littoraux est totalement saturé : l'urbanisation s'est traduite par un bétonnage massif des côtes, détruisant des milieux méditerranéens. Les pollutions de toute nature (rejets de déchets ou de gaz à effet de serre) sont monnaie courante : elles dégradent la qualité de l'eau, de l'air¼ et contribuent au développement de certaines maladies et renforcent le réchauffement climatique. Enfin, de plus en plus d'Etats (surtout ceux du Proche-Orient) sont menacés de pénurie en eau - de façon ponctuelle
ou permanente, ce qui entraîne des conflits de partage entre les différents utilisateurs.
• Des raisons naturelles expliquent ces menaces : l'aridité du climat méditerranéen renforce le stress hydrique et la configuration de la Méditerranée en amphithéâtre montagneux concentre les densités sur les littoraux. Les facteurs humains jouent un rôle bien plus important encore. Le non respect de normes élémentaires en matière d'environnement et l'implantation d'activités gourmandes en eau/et ou polluantes aggravent les menaces environnementales qui pèsent sur le bassin méditerranéen.
• Peu de mesures concrètes sont mises en place, si ce n'est les restrictions d'eau. Globalement, les politiques de gestion durable du bassin méditerranéen n'en sont qu'au stade des intentions, même si globalement les Etats du Nord sont plus avancés que ceux du Sud et de l'Est (ils ont mis en place des normes environnementales et des mesures de protection des littoraux mais qui ne sont valables que pour leur propre territoire).
C. Des politiques de coopération encore timides • En matière de lutte contre l'immigration clandestine, la politique mise en place par
l'UE (et imposée aux PSEM) est jugée comme trop sécuritaire : ils ferment les frontières de l'espace Schengen pour stopper l'entrée de migrants clandestins (ou pas). De plus, des inégalités de développement très fortes et des conflits persistent encore dans le bassin méditerranéen, ce qui freine la mise en place de ces politiques de
coopération (car les Etats manquent d'argent ou ne parviennent pas à s'entendre).
• Les revendications majeures -émanant surtout des PSEM - afin d'améliorer la
coopération méditerranéenne portent sur trois points :
- traiter les questions migratoires à la source : il s'agirait d'aider les PSEM à
se développer afin de dissuader les migrants de partir (les gens quittent les PSEM pour des questions de faiblesse de revenus et de mauvaises conditions de vie, espérant en trouver de meilleures en Europe). En cela, les PSEM appellent à la mise en place de politiques de codéveloppement (financement par des pays du Nord de politiques de développement dans des pays du Sud,
afin de tarir les flux migratoires) ;
- associer davantage les populations locales aux décisions prises et aux projets
réalisés : il s'agirait de faire en sorte que la coopération réponde mieux aux besoins des populations et ne soient plus uniquement décidés par des
fonctionnaires ou des experts (c'est l'éternel reproche adressé à l'UE) ;
- tenir les engagements annoncés dans le cadre de ces politiques de
coopération (notamment au plan financier, car l'UE se désengage ou ne s'engage pas autant qu'elle l'avait promis).
Conclusion Un zoom des inégalités à l'échelle mondiale
• Le bassin méditerranéen est une zone de fractures de la planète, du fait de la mise en contact
de deux espaces dont les niveaux de développement sont éloignés. C'est une situation
relativement rare pour être signalé (c'est aussi le cas de la frontière Etats-Unis/Mexique).
• Cette interface Nord-Sud génère des flux massifs, qui ne seraient certainement pas si actifs sans ce différentiel de développement aussi important. Pendant très longtemps, les échanges n'ont profité qu'aux Etats de la rive Nord de la Méditerranée (notamment à l'époque coloniale) alors que depuis une vingtaine d'année, les premières retombées de ces flux se font sentir dans les pays de la rive Sud : les flux touristiques et d'hydrocarbures, notamment, créent des emplois et de la richesse en Afrique du Nord et au Proche-Orient.
• La tendance actuelle est à la coopération entre les deux rives, afin de régler des problèmes qui concernent l'ensemble des Etats du bassin méditerranéen. Cependant, cette coopération est encore bien timide.
Pour conclure, dire que la Méditerranée est un clivage est faux. Le clivage passe au milieu de la rive nord, ou au niveau du Sahara.
On peut dire qu’il s’agit d’une interface.
Mais une interface de 800 Kms de large, dans laquelle les littoraux et les îles jouent le rôle essentiel
Mais une interface où les relations Orient/Occident (UE) sont au moins aussi importantes que les relations Nord/Sud.
Mais une interface dominée par la discontinuité : il y a peu de relations entre Espagne et Maroc ou entre l’Italie et la Tunisie.
Le meilleur concept serait en fait celui d’espace intermédiaire, tout comme le climat méditerranéen est un climat intermédiaire.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire